Anxiété sociale

La phobie sociale : qu’est-ce que c’est ?

La phobie sociale (SP), ou trouble d’anxiété sociale, est un type de trouble anxieux récemment défini (1980 aux États-Unis) et est maintenant considéré comme l’un des troubles mentaux les plus courants. Cela correspond à ce qu’on appelle traditionnellement une personne timide extrême, agaçante ou impuissante.

Les Symptômes

La phobie sociale est caractérisée par une peur intense qui survient dans une ou plusieurs situations sociales et qui entraîne une gêne et un handicap dans la vie quotidienne. Ces peurs peuvent être déclenchées par le fait d’être observé par les autres ou de penser qu’on l’est. Les patients craignent d’être vus comme anxieux, bizarres, distants, repoussants ou au contraire trop attirant, trop gros, handicapés, porteurs d’une maladie contagieuse ou pouvant supposer l’être, ou idiots. Même si ces peurs sont reconnues excessives et irrationnelles par la personne, il lui est très difficile de les surmonter. Les situations sociales sont donc progressivement évitées ce qui aggrave progressivement le trouble et entraîne un isolement.

Certaines personnes souffrant de phobie sociale ont peur de nombreuses situations sociales alors que ces difficultés sont limitées aux situations de performance chez d’autres (situation où l’on est jugé ou évalué par les autres). On parle alors de « phobie sociale de performance ».

Contrairement à d’autres troubles psychiatriques, on ne retrouve pas d’idées de persécution. Ces patients sont particulièrement vulnérables à d’autres troubles mentaux comme la dépression, les dépendances.

Les symptômes physiques qui accompagnent la phobie sociale sont : le fait de rougir ou de transpirer excessivement, des tremblements, des palpitations et des nausées. Un bégaiement peut être présent associé à un débit verbal rapide. Des attaques de panique peuvent apparaître lors de peur intense.

Souvent, la phobie sociale apparaît précocement. La moitié des patients l’ont développé avant l’âge de 11 ans et 80 % avant l’âge de 20 ans. Un diagnostic précoce pourrait aider à diminuer les symptômes et le développement de problèmes associés.

Aspects cognitifs

Dans les modèles cognitifs de phobie sociale, les patients redoutent la manière dont ils vont être perçus par les autres. Ils sont excessivement focalisés sur eux-mêmes et ont des attentes très élevées. D’après la théorie de l’autoprésentation développée en psychologie sociale, les patients essayent de créer une image positive d’eux mais sont incapables de le faire. Ils peuvent devenir extrêmement consciencieux, faire excessivement attention à toute erreur ou tout problème qui pourrait arriver et tentent de tout anticiper.

Après l’épisode angoissant, ils peuvent avoir la perception qu’ils ont été mauvais. Par la suite, ils vérifieront tout ce qui pourrait être anormal ou embarrassant. Ces pensées, qui peuvent durer plusieurs semaines, sont souvent pessimistes, auto-défaitistes et infondées. Les patients interprètent souvent une expression neutre ou ambiguë de manière négative. De nombreuses études suggèrent que les personnes anxieuses se souviennent plus des souvenirs négatifs que les autres personnes. Les distorsions cognitives sont une caractéristique principale de ce trouble. Elles sont identifiées et assouplies en thérapies cognitivo- comportementales.

Symptômes physiologiques

Ils sont communs aux troubles anxieux, et peuvent aller jusqu’à l’attaque de panique. Ils appartiennent au registre de la réponse physiologique combat-fuite :

  • une tachycardie ;
  • une transpiration ;
  • une hyperventilation ;
  • une oppression thoracique ;
  • des difficultés respiratoires ;
  • un rougissement ;
  • des douleurs abdominales ;
  • des nausées ;
  • des tremblements ;
  • un bégaiement ;
  • des larmes.

Aspects comportementaux

Les symptômes alimentent un cercle vicieux, car ils peuvent confirmer le vécu des patients et ainsi renforcer leur anxiété.

Évitement

Pour éviter ces désagréments, les patients évitent ces situations, ce qui empêche cette réponse physiologique, mais a tendance à les sensibiliser à aggraver leurs troubles à plus long terme. Ainsi, ils choisissent de s’isoler progressivement de la société.

Ils peuvent également se sentir mal à leur aise lorsqu’ils rencontrent de nouveaux individus et agir d’une manière distante lorsqu’ils sont en groupe.

On parle de comportements évitants mineurs lorsqu’un individu tente d’éviter tout contact visuel ou qu’il croise les bras pour éviter d’exposer un tremblement.

Aspects émotionnels

Les effets physiologiques, similaires à ceux diagnostiqués dans d’autres troubles anxieux, sont présents chez les individus souffrant de phobie sociale. Chez les adultes, elles peuvent causer des pleurs.

 

Comorbidités

La phobie sociale est souvent associée à d’autres psychoses. 66% des patients ont au moins un autre trouble psychiatrique apparenté.

Dépression

La dépression y est souvent associée. 1,49 à 3,5 fois plus fréquent dans PS. Cela peut être causé par un manque de relations personnelles et un isolement prolongé causé par l’évitement des situations sociales.

Dépendances

Pour limiter ces effets désagréables, les personnes peuvent consommer des drogues comme l’alcool pour réduire leur anxiété. 20% des patients concernés souffrent d’alcoolisme. A l’inverse, d’autres études ont montré que la phobie sociale (PS) n’est pas associée aux problèmes d’alcoolisme, voire prévient les problèmes d’alcoolisme. Les patients souffrant à la fois d’alcoolisme et de PS ont un risque accru de rechute. L’alcool peut aider au début, mais une forte consommation et des symptômes de sevrage peuvent compliquer la tâche. Le même phénomène semble exister pour les benzodiazépines.

Troubles anxieux

D’autres troubles anxieux peuvent être associés, comme le trouble anxieux généralisé, le trouble de la personnalité évitante avec des taux de comorbidité entre 25 % et 89 %.

Difficultés relationnelles

D’autres troubles peuvent entraîner des difficultés relationnelles notamment à cause de déficits de théorie de l’esprit ce qui n’est habituellement pas le cas chez les patients PS. Si ces troubles sont mieux expliqués par un trouble du spectre autistique comme le syndrome d’Asperger, on ne peut pas poser le diagnostic de PS. Cependant, 28 % de ces patients présentent les symptômes de ces deux troubles. Le handicap est plus important chez les patients qui ont un désir d’avoir des relations sociales mais qui sont conscients de leurs difficultés relationnelles.

Trouble bipolaire et TDAH

La PS serait souvent associée au trouble bipolaire ou au trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité. Certains chercheurs ont fait l’hypothèse d’une sensibilité cyclothymique-anxieuse. Certaines études montrent que les patients avec PS traités avec des antidépresseurs développaient plus fréquemment une hypomanie que les non phobiques.

Phobie sociale ou trac ?

Lorsque nous n’exerçons pas une profession qui nous amène à prendre régulièrement la parole, à débattre ou encore à argumenter en public, nous sommes tous confrontés au trac. Qui ne se rappelle pas avoir eu très peur le jour d’un examen oral ou d’une soutenance ?

Cet état est tout à fait normal. D’ailleurs, cette anxiété importante qui apparaît avant l’événement en question, disparaît rapidement après sa réalisation.

Dans le cadre de la phobie sociale, l’anxiété ne diminue pas, mais elle peut augmenter durant l’événement et peut même parfois aboutir à une attaque de panique faisant perdre tous moyens et toute possibilité de performance et de réussite. La honte envahit la personne après la présentation.

Phobie sociale : quelles sont les causes ?

Plusieurs facteurs peuvent se conjuguer pour provoquer un état de phobie sociale : physiologiques, biographiques, caractérologiques, environnementaux, comportementaux (mode de vie), chacun d’eux n’étant pas suffisant pour être pathologique s’il est considéré de façon indépendante.

D’une façon générale, les causes physiologiques de la phobie sociale peuvent être les mêmes que pour les autres troubles anxieux. Une proportion importante de cas peut être due à la prise de médicaments ou de substances ayant des propriétés de stimulant psychique (le spectre allant du café aux amphétamines en passant par certains antidépresseurs), ou à l’arrêt trop rapide de substances ou de médicaments à effets sédatifs (antidépresseurs, alcool, anxiolytiques, etc.). D’autres cas peuvent être induits par des déséquilibres hormonaux.

De nombreuses études ont cherché à mettre en évidence des bases neurobiologiques de la phobie sociale. Elles parviennent à montrer que la timidité s’accompagne de certaines modifications de la répartition de certains neurotransmetteurs et une hyperactivité de certaines régions cérébrales.

Dopamine

La sociabilité est fortement liée au système lié à la dopamine. Il existe une relation directe entre le statut social de volontaires et l’affinité des récepteurs D2 et D3 dans le striatum.

L’affinité des récepteurs D2 dans le striatum des patients atteints de phobie sociale est plus basse que chez des sujets sains. Il existe une anomalie de la densité du transporteur de la dopamine dans le striatum de ces patients.

La prévalence des phobies sociales chez les patients atteints de maladie de Parkinson et de schizophrénie semble plus élevée. Une étude a retrouvé une prévalence de 50 % de phobie sociale chez les patients atteints de maladie de Parkinson. On a trouvé des symptômes de phobie sociale chez des patients traités par antagonistes dopaminergiques comme l’haloperidol.

Cependant, d’autres études n’ont pas réussi à confirmer ces premiers résultats retrouvant une perturbation du système dopaminergique chez ces patients.

Sérotonine

Il existe une augmentation de la libération de la sérotonine dans l’amygdale, la région des noyaux du raphé, le noyau caudé, le putamen, l’hippocampe et le cortex cingulaire antérieur chez ces patients. Il existe aussi une augmentation du transporteur de la sérotonine dans la région des noyaux du raphé, le noyau caudé, le putamen, le thalamus et le cortex insulaire.

Facteurs génétiques et familiaux

La génétique jouerait un rôle important en interaction avec l’environnement. Des études de jumeaux monozygotes adoptés et élevés dans des familles différentes ont montré que si l’un des jumeaux a développé une PS, l’autre jumeau a un risque de 30 à 50 % supérieur de développer aussi ce trouble.

Avoir un parent de premier degré atteint augmente de 2 ou 3 fois les risques d’avoir une PS. Ceci peut être associé à des facteurs génétiques mais aussi à l’apprentissage des évitements grâce à l’apprentissage par observation et l’éducation parentale. Des études suggèrent que lorsque les parents sont atteints d’un trouble anxieux ou d’une dépression, alors leur enfant est plus susceptible de développer un trouble anxieux. Les études suggèrent que les parents des patients atteints sont plus isolés socialement eux-mêmes. La timidité chez les parents adoptifs est significativement corrélée à la timidité des enfants adoptés.

Soutien familial

Grandir avec des parents trop protecteurs ou hypercritiques est aussi associé avec la PS. Des adolescents qui ont eu un attachement non sécure (anxieux-ambivalent) avec leurs parents avaient 2 fois plus de risque de développer un trouble anxieux dans la fin de leur adolescence notamment la phobie sociale.

On trouve des situations d’environnement familial renfermé, diminuant les expériences de sociabilisation. La phobie devient acquise lors de l’adolescence, parfois à la suite d’un événement traumatisant.

Expériences sociales

Une expérience sociale négative peut être déclencheuse d’une PS. Pour environ la moitié des patients, un traumatisme psychologique ou un évènement social humiliant semble associé avec l’apparition ou l’aggravation des troubles. Ce type d’événement semble particulièrement associé à une phobie spécifique de performance par exemple faire une présentation en public. Par ailleurs, le fait d’avoir eu des expériences directes ou indirectes en ayant pris connaissance d’expériences sociales désagréables chez d’autres pourrait rendre le développement de ce trouble plus fréquent.

La phobie sociale pourrait être causée par le fait d’être rejeté ou d’avoir des difficultés d’intégration. Des enfants timides ou évitants ont pointé des expériences négatives avec leurs pairs ou du harcèlement. La popularité pourrait être inversement corrélée avec la phobie sociale et les enfants rejetés par leurs pairs pourraient avoir un plus grand risque d’avoir une PS et une plus grande peur d’avoir des remarques négatives que les autres enfants. Les enfants phobiques sociaux reçoivent moins souvent des réactions positives de leurs pairs et ils peuvent s’isoler secondairement

Facteurs sociaux et culturels

Des facteurs culturels peuvent être liés à la PS notamment l’attitude de la société envers la timidité et les évitements, ce qui a des conséquences sur les relations interpersonnelles, l’accès à l’emploi, les relations scolaires et la honte. L’éducation serait différente selon les cultures.

Les enfants américains seraient plus susceptible de développer ce trouble si les parents donnent de l’importance à l’opinion des autres et utilisent la culpabilisation comme stratégie éducative. Cette association n’a pas été retrouvée chez les enfants chinois ou les sino-américains. Les enfants timides semblent plus acceptés par leurs pairs et sont plus respectés dans leur aptitudes à diriger ou à être compétent contrairement à ce qui se passe dans les pays occidentaux.

Des difficultés à développer des compétences sociales pourrait aggraver la PS à cause d’une incapacité ou diminution de la confiance à agir avec d’autres ou le moins bon accueil des autres avec moins de réactions positives. Les études sont cependant mitigées. Certaines n’ont pas réussi à démontrer des baisses de performances significatives alors que d’autres si. Cependant, les patients PS perçoivent leurs compétences sociales comme basses. Il est possible que l’augmentation du besoin pour des compétences sociales sophistiquées pour créer des relations avec les autres ou une carrière, l’augmentation du sentiment de compétition et du besoin d’affirmation de soi rend les problèmes d’affirmation de soi plus fréquents notamment parmi les classes moyennes.

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